Le tennis canadien était à l’honneur lors des premiers tours des tournois de Tokyo (WTA 500) et de Bâle (ATP 500), bien qu’il aurait peut-être été préférable pour les Canadiens d’être sous les feux de la rampe plus tard dans le tournoi.
Lorsque les tirages des deux épreuves ont été dévoilés, les amateurs canadiens ne savaient probablement pas s’ils devaient rire ou pleurer. Les deux tournois ont en effet donné lieu à des duels entre compatriotes du Grand Nord blanc dès le premier tour.
Quelles étaient les probabilités ?
À Tokyo, les deux dernières Canadiennes à avoir remporté le titre de l’Omnium Banque Nationale, Bianca Andreescu en 2019, à Toronto, et Victoria Mboko en 2025, à Montréal, se sont livré bataille en lever de rideau, mardi. Puis, mercredi, les Montréalais Félix Auger-Aliassime et Gabriel Diallo ont fait de même à Bâle.

Devoir affronter un compatriote peut être un peu étrange, surtout pour les Canadiens, car ils ne sont qu’une poignée à évoluer sur les circuits principaux. De plus, jouer contre quelqu’un que l’on connaît bien et que l’on admire peut rendre le match d’autant plus difficile.
« Je ne m’attendais vraiment pas à affronter Bianca, a mentionné Mboko. Au début, j’étais plutôt mal à l’aise, mais après tout, ce n’est qu’un match. Je voulais bien jouer et me concentrer sur ce que je devais faire pour donner le meilleur de moi-même aujourd’hui. Je n’aimais pas voir Bianca de l’autre côté du filet. »
Elle a effectivement joué à son meilleur niveau. Mboko a battu sa compatriote 6-3 et 6-3, remportant ainsi son premier match depuis la finale de Montréal en août.
« C’est évidemment difficile quand deux Canadiennes s’affrontent, mais c’est le sport. J’essaie de ne pas trop m’attarder là-dessus, a expliqué Andreescu après le match. Bien sûr, je joue contre une Canadienne. Je veux bien jouer. Mais j’essaie de prendre ce match comme n’importe quel autre, car chaque match est important. »
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Malgré la défaite, Andreescu était très positive. À la fin de la rencontre, elle s’est approchée du filet en souriant et a serré sa jeune compatriote dans ses bras. Lors de son entrevue d’après-match, elle a fait l’éloge de Mboko.
« Je pense avoir livré un bon combat. Elle était simplement meilleure que moi aujourd’hui. Elle a bien joué. Elle a fait tout ce qu’elle devait faire. De mon côté, ce sont quelques décisions qui auraient pu faire toute la différence dans ce match. Mais je suis heureuse pour elle. Elle joue tellement bien. Je suis vraiment très heureuse pour elle. »
Pour ajouter à la bizarrerie du tirage à Tokyo, Andreescu et Mboko se sont retrouvées sur le même terrain à deux reprises mardi. En effet, quelques heures après leur affrontement en simple, les deux joueuses ont fait équipe en double.
S’il y avait une certaine gêne après la rencontre plus tôt dans la journée, elles l’ont rapidement surmontée et ont signé une victoire de 6-7(4), 6-1 et 10-7 contre Emiliana Arango et Zeynep Sonmez.
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« Seulement au tennis. Seulement au tennis », a commenté Andreescu en riant lorsqu’on lui a demandé ce qu’elle pensait de devoir jouer en double avec celle qui l’avait éliminée plus tôt dans la journée.
« C’est vraiment bizarre, parce qu’on essaie de se mettre dans un autre état d’esprit, surtout quand on est celle qui a perdu. Et évidemment, pour elle non plus, ce n’est pas facile, parce que je suis sûre qu’elle veut aussi me voir réussir. Mais c’est comme ça, c’est le jeu. Il faut simplement se ressaisir. »

Et c’est ce qu’elles ont fait. Andreescu, qui n’avait disputé que 57 matchs de double sur le circuit de la WTA avant le tournoi de Tokyo, était très satisfaite de la façon dont elles ont joué. « Nous avions une très bonne complicité. C’est la première fois que nous jouons ensemble. Je crois que si nous continuons à jouer en ensemble, ce que j’espère, plus nous formerons une excellente équipe. »
Andreescu n’a que six ans de plus que Mboko, mais dans le sport, c’est un écart considérable. Passer du temps ensemble sur le terrain à Tokyo est une occasion que l’adolescente de 18 ans savoure pleinement.
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« Bianca est une personne très calme et extrêmement positive, surtout lorsque je joue en double avec elle, a confié Mboko après leur victoire en double. Je pense que cela m’a beaucoup aidée aujourd’hui. Elle a beaucoup d’expérience et j’apprends énormément à ses côtés. Je pense donc que passer beaucoup de temps avec elle pendant ce tournoi peut également contribuer à mon développement personnel. »
Après sa victoire en simple contre Andreescu, Mboko a pris la mesure d’Eva Lys en deux manches de 6-1 et 6-1 pour accéder aux quarts de finale à Tokyo.
Mercredi, c’était au tour d’Auger-Aliassime et de Diallo de croiser le fer à Bâle, en Suisse.
S’il s’agissait de la première rencontre entre les deux joueurs sur le circuit de l’ATP, ils étaient toutefois habitués à se trouver sur le même terrain. Les deux Montréalais ont souvent joué ensemble lorsqu’ils étaient plus jeunes, ils ont été des coéquipiers à la Coupe Davis, et faisaient d’ailleurs tous deux partie de l’équipe championne de 2022.
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« Ce n’est évidemment pas facile de jouer contre quelqu’un d’aussi proche que Félix, nous avons grandi ensemble et nous avons une relation extraordinaire, a commenté Diallo mercredi après le match à Bâle. Il m’a beaucoup aidé, surtout lorsque j’ai fait la transition entre le tennis universitaire et le niveau professionnel. C’était en fait très agréable de pouvoir jouer l’un contre l’autre sur les plus grandes scènes, après toutes les fois où nous nous sommes entraînés ensemble, et j’étais très reconnaissant de pouvoir vivre ce moment avec lui. »
« Ce n’est pas facile. C’est assez étrange, en fait, a avoué Auger-Aliassime. En même temps, je pense que nous pouvons être fiers de mettre le tennis canadien sur la carte en nous affrontant à un niveau élevé. »
Auger-Aliassime a gagné le duel 6-2 et 7-5.
« [Gabriel] s’est tellement amélioré qu’il mérite de figurer parmi les meilleurs joueurs du monde. Cependant, quand on doit s’affronter et essayer de se battre, cela peut être un peu étrange et stressant. Ce n’était donc pas très agréable. Mais il a été professionnel et a essayé de gagner. »
Même s’il s’agissait de leur première rencontre sur le circuit, leur histoire personnelle faisait qu’ils connaissaient déjà très bien le jeu l’un de l’autre. Tous deux ont déclaré que leur préparation n’avait pas été différente de celle d’un autre match, même si Auger-Aliassime a ajouté : « Tu essaies de te concentrer sur toi-même. Je ne peux pas me concentrer sur autre chose que ma préparation physique, mentale et tennistique. Évidemment, nous connaissons bien nos forces et nos faiblesses, mais tout est question d’exécution et de savoir qui sera le plus performant le jour J. »
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Auger-Aliassime n’a que 13 mois de plus que Diallo, mais il évolue sur le circuit depuis bien plus longtemps, puisqu’il a fait son entrée chez les professionnels en 2017. Quant à Diallo, il a choisi le parcours universitaire et n’est devenu professionnel qu’en 2023. Auger-Aliassime a donc joué un rôle de mentor plus important que ce à quoi on aurait pu s’attendre compte tenu de leur proximité d’âge.
« [il a eu] une énorme influence, sans lui, je ne sais pas si je serais le joueur que je suis aujourd’hui et que j’espère devenir. Son père et lui m’ont beaucoup aidé avant mon départ pour l’université. Et après, Félix m’a beaucoup aidé dans ma transition chez les pros. C’est un de mes amis les plus proches. »
Auger-Aliassime était fier lorsqu’on lui a demandé comment Diallo avait évolué en tant que professionnel.
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« C’est une évolution qui est remarquable. Il y a des moments où je pense que certaines personnes ne croyaient pas en lui, mais je pense que lui, il a toujours cru en lui. Des gens proches de lui ont toujours cru en lui, et maintenant il prouve à tout le monde qu’il a sa place parmi les meilleurs. Donc, magnifique. C’est toujours une belle histoire de prouver aux gens qui ont des doutes sur toi que tu as ta place parmi les meilleurs joueurs de tennis. »
Si Diallo parvient à terminer la saison dans le Top 50 — il occupe actuellement le 41e rang —, ce serait la première fois que trois Canadiens font partie des 50 meilleurs joueurs du monde dans le classement de fin d’année, se joignant à Auger-Aliassime et à Denis Shapovalov.
Photo vedette : Robert Prange/WTA